Axes thématiques > Réticularité des contacts de langues

Axe 2. Réticularité - approche en réseaux des contacts de langue

Comme le suggérait Alain Kihm, dans une conférence inédite datant de 2006, présentée au colloque d’hommages à Pierre Encrevé, toute approche des phénomènes intenses et prolongés de contacts de langues gagne à être pensée sous quatre formes de réseaux de paramètres structuraux, qui rendent compte des relations de convergence et de divergence entre les langues ou les variétés des répertoires des locuteurs d’un espace donné, y compris, de manière plus universelle, entre les langues du monde :

Réseaux G.U. (universaux, principes) – que l’on retienne le concept de G.U., comme « Grammaire Universelle » chomskyenne, ou que l’on pense tout simplement en terme d’invariants, de naturalité et de tendances observables à grande échelle dans les langues du monde.

Réseaux Typologiques (types, paramètres, comme l’ordre des mots SVO vs. SOV, VOS, VSO ; l’ordre des spécifieurs ou déterminants par rapport aux déterminés, comme N+Dét vs. Dét+N, etc.). On se référera, de ce point de vue, aux apports empiriques du WALS (https://wals.info/) et de l’APiCS (cf. https://apics-online.info/), ne serait-ce que pour délimiter des paramètres typologiques.

Réseaux Génétiques (les « familles de langues » : indo-européenne, afro-asiatique, austronésien, etc. ; une sous-famille de langues, comme les langues romanes ou germaniques ou slaves est désormais appelée un genus, au sein d’une famille). Les CBLF des Caraïbes et de l’Océan indien forment ainsi au moins deux de ces entités, à moins qu’on ne doive les considérer comme deux hyperdialectes, au sens où l’entendait Marcel Courthiade pour le rromani – également langue en contact par exellence.

Réseaux Aréaux : Sprachbund, Linguistic Area, Unions de Langues, dont l’aire de convergence structurale des Balkans est un exemple célèbre. Non seulement toutes les aires créolophones constituent des formes d’aires de convergence structurale à des degrés divers, mais ce phénomène s’intensifie particulièrement dans certaines zones, comme les Guyanes, ou les Mascareignes. Les variétés de français « basilectal » d’Afrique sont elles-mêmes intégrées dans diverses aires de convergence, comme l’aire du Sahel occidental.

Cette approche réticulaire, en réseaux et en treillis de relations et d’interaction, sur quatre niveaux de structuration, du plus abstrait au plus concret et ancré territorialement, pourrait être envisagée de manière complémentaire à celle en archipels - ou pensée archipélique - , caractéristique des penseurs antillais, et d’Edouard Glissant en particulier. Elle est applicable aux approches littéraires et culturelles, si l’on interprète ces échelles d’analyse en termes d’universalité, de typologie, de phylogenèse et de territorialité. Là encore, c’est la Relation qui serait au centre de la problématique, mais envisagée du point de vue de sa trame sociocognitive, socioculturelle, linguistique.Par ailleurs, la linguistique descriptive trouve également toute sa place dans cet axe, soit en mobilisant un seul des réseaux mentionnées, soit plusieurs, en relations mutuelles.


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